Munchhausen
   

Histoire mouvementée de la création d'une réserve naturelle, celle du «Delta de la Sauer». Les écologistes qui s'impliquent dans la gestion des forêts rhénanes «depuis près de 30 ans» (Pr. R. Carbiener) veulent obtenir la fonction de gestionnaire de cette nouvelle réserve. Ils mettent en cause ouvertement les systèmes de gestions adoptés par les ingénieurs de l'ONF qu'ils n'estiment pas compatibles avec ceux adoptés dans le cadre d'une réserve naturelle. Soutenus de manière implicite par la Ministre de l'Environnement, ils obtiennent finalement, par l'entremise du C.S.A., la gestion de la réserve, au grand désarroi des élus des communes de Seltz et de Munchhausen. Ceux-ci, propriétaires des terrains concernés, redoutent de perdre tout droit de regard sur les futurs aménagements à l'intérieur de la réserve.

Les archives disponibles :
- Mardi 9 Septembre 1997 : des «réserves» (DNA),
- Mercredi 22 Juillet 1998 : des tiraillements (DNA),
- Dimanche 25 Octobre 1998 : un favori (DNA),
- Samedi 13 Février 1999 : un gestionnaire (DNA).


  Mardi 9 septembre 1997 Précédent | Suite  
   


 Lionel Jospin et Dominique Voynet ont cosigné, le 2 septembre, le décret créant la réserve naturelle du « delta » de la Sauer. Une nouvelle attendue depuis une vingtaine d'années.


 Les trois coups de l'avant-dernier acte de la création de cette réserve naturelle rhénane ont été frappés le 23 juin 1994, lors de l'ouverture d'une enquête publique plusieurs fois retardée. Le rideau se lève à présent sur une réserve naturelle dont, par avance, Alsace Nature a annoncé qu'elle sera vidée de son sens et manquera de cohérence.

 Entre une réserve bancale et un projet frappé de paralysie, le ministre de l'environnement a dû se résoudre à choisir le moindre mal. Quitte à ce que le Préfet de région choisisse un gestionnaire efficace pour mettre en oeuvre un plan de gestion écologique qui sauve ce qui peut encore l'être. Le Conservatoire des sites alsaciens et l'ONF sont sur les rangs, pour gérer cette réserve naturelle, où une malencontreuse piste cyclable transfrontalière a été ouverte assez récemment.

Chasse jusqu'en 2 005

 Alors que l'enquête publique de 1994 prévoyait que la chasse y serait interdite totalement à partir de février 1997, grâce à une indemnisation des communes à hauteur de 170 F/ha, le décret ministériel fait machine arrière. Et ce, pour au moins 9 ans, puisque l'article 8 du décret prévoit que : « A l'échéance des baux de chasse en cours (...) l'exercice de la chasse est interdit ». En pratique ce sera pour l'an 2005, puisqu'on a attendu les adjudications de 1996-1997 pour signer le décret.

 Résultat : la réserve de Munchhausen a été louée fort cher à un chasseur de Rastatt...qui devra néanmoins respecter l'interdiction de nourrir les sangliers.


Michel Gissy

© Archives des Dernières Nouvelles D'Alsace, 1999

  Mercredi 22 Juillet 1998 Précédent | Suite  
   


 Qui sera nommé conservateur de la réserve naturelle du delta de la Sauer ? Le Préfet est tiraillé entre le Conservatoire des sites alsaciens et le candidat des communes associées à l'ONF.


 Créée le 2 septembre 1997, la réserve naturelle de Seltz-Munchhausen (appelée réserve naturelle du delta de la Sauer) n'a toujours pas de conservateur. La situation ne peut perdurer indéfiniment, car c'est le conservateur qui doit proposer le plan de gestion de cette réserve rhénane. Or, des décisions doivent être arrêtées sans trop tarder, notamment en ce qui concerne la maîtrise de la circulation motorisée et cycliste.

 Il faudra aussi décider de l'élimination des plantations de peupliers hybrides qui dénaturent le site, élaguer les saules têtards et en bouturer d'autres, sans créer de clones. Des études scientifiques sur la faune et la flore devront constituer « l'état zéro » de la connaissance des lieux. Certes, des travaux ont déjà été menés par plusieurs naturalistes, notamment Carbiener, Diellmann, Steimer et Koenig. Toutefois, ils ne couvrent pas tous les domaines et d'autres investigations devront les compléter.

 Cette réserve naturelle à la gestation interminable et mouvementée connaît donc un nouveau contretemps. Et il faudra vraisemblablement attendre l'automne pour apprendre le nom de la personnalité choisie comme conservateur. Le Préfet n'aura pas la tâche facile, écartelé qu'il est entre la préférence supposée du ministre de l'environnement à l'égard du Conservatoire des sites alsaciens et la pression exercée par la communauté de communes du delta de la Sauer, associée à l'ONF.

 En effet, le 31 mai à Sélestat, Dominique Voynet avait fini par concéder à Alsace Nature « qu'elle n'aura pas beaucoup de motifs de se plaindre de ce qui sera décidé ». La fédération ne s'en était pas tenue à cette assurance, en critiquant, par la suite, la gestion de la forêt alsacienne par l'ONF.

Des transfuges du CSA

 Cette pression exercée sur l'opinion publique par le milieu associatif n'a provoqué aucune réaction de l'ONF, tenu au devoir de réserve. De son côté, la communauté des communes de Seltz-delta de la Sauer, partenaire de l'ONF, a présenté sa candidature pour gérer son propre patrimoine naturel. A l'affirmation d'une légitimité de propriétaire s'associe donc la mise en avant d'une compétence technique pour revendiquer la gestion de la réserve.

 L'ONF s'enorgueillit en effet de gérer la réserve naturelle volontaire de l'Illwald, à Sélestat et un réseau de réserves biologiques domaniales créées ou en cours de création à Daubensand, la Wantzenau, Offendorf, Mothern, Lauterbourg et Marckolsheim.

 L'Office met aussi en avant les compétences naturalistes de plusieurs de ses ingénieurs, techniciens et agents ; mais ce n'est pas du corps des forestiers qu'est issu le candidat à la conservation de la réserve. L'atout qu'abat le partenariat communes-ONF est celui d'un ingénieur-écologue allemand : Richard Hauschild. Ses partisans sont convaincus de la portée symbolique de cette candidature d'un Allemand dans une réserve naturelle française, intégrée dans le parc rhénan transfrontalier.

 Au-delà du symbole binational, cette candidature est sans doute une pierre jetée dans le jardin du Conservatoire des sites alsaciens. Car R. Hauschild a, auparavant, mené des études scientifiques sur des milieux rhénans, pour le compte du ...CSA ! Pis encore, la proposition de Jean-Paul Klein comme consultant scientifique n'est pas faite pour apaiser le CSA. Car le Dr J-P Klein avait été le conservateur des réserves d'Offendorf et Erstein, gérées par le CSA.

 La décision que le Préfet prendra fera donc nécessairement des mécontents. Le match communes+ONF contre CSA+ Alsace Nature peut-il être arbitré sereinement par le préfet sous la houlette de la ministre des Verts ?


Michel Gissy

© Archives des Dernières Nouvelles D'Alsace, 1999

  Dimanche 25 Octobre 1998 Précédent | Suite  
   


 Le comité consultatif de la réserve naturelle de Munchhausen-Seltz a désigné son gestionnaire favori : le conservatoire des sites alsaciens. Grincements de dents du côté des communes.


 Deux candidats sont en lice pour la gestion de la réserve naturelle du delta de la Sauer : le conservatoire des sites alsaciens soutenu par les écologistes et la communauté de communes du delta de la Sauer en duo avec l'office national des forêts. Réuni mardi à Strasbourg, le comité consultatif chargé d'analyser ces deux candidatures a voté majoritairement en faveur du CSA qui a totalisé 19 voix, contre 15 voix à son adversaire et quatre abstentions. Certes, cet avis ne préjuge pas de la décision du préfet à qui reviendra le dernier mot mais l'affaire semble bien mal engagée pour les communes.

 Le maire de Seltz et président de la communauté de communes, Hugues Kræmer, ne décolère pas. « Notre regroupement a compétence pour ce qui est de la gestion de l'environnement et l'aménagement de l'espace, explique-t-il. Depuis que le projet de classement en réserve naturelle a été lancé, les conseils municipaux de Seltz et Munchhausen ont pris des délibérations en sa faveur, à condition d'en garder la responsabilité... ». Munchhausen fournissant 76 % de la surface et Seltz 21 %, « c'est une condition légitime », observe l'élu, d'ores et déjà persuadé que le préfet avalisera l'avis du comité.

Des irrégularités ?

 « Nous avions la compétence politique mais nous n'avions pas la compétence technique et scientifique. C'est pour cela que nous nous sommes associés à l'ONF », argumente Hugues Kræmer. Le choix de son regroupement de communes est d'autant plus naturel à ses yeux que la zone est incluse dans le projet transfrontalier de l'association Parc Rhénan Pamina dont il est également le président.

 « La population ne va pas comprendre cette décision », ajoute l'élu qui prévoit une levée de boucliers de ses administrés et ceux de Munchhausen. Hugues Kræmer redoute par dessus tout la main mise de « protecteurs de la nature intégristes » sur un secteur de 500 hectares. Et de s'en prendre par la même occasion au ministre de l'environnement Dominique Voynet qui avait ouvertement apporté son soutien aux écologistes lors d'une visite en Alsace début juin et pronostiqué une décision préfectorale en leur faveur.

 Furieux, le maire n'exclut pas d'ester en justice si le CSA remporte la mise in fine, ce qui aujourd'hui ne fait plus guère de doute. Selon lui, la procédure de désignation des membres de la commission consultative a été entachée d'irrégularités. « Des membres favorables au CAS ont été désignés au dernier moment », indique-t-il, alors que « les propositions de Munchhausen n'ont pas été acceptées ».

 Au conservatoire des sites alsaciens, on se félicite, bien sûr, de l'avis du comité qui constitue « l'expression d'une confiance partagée à notre égard », précise le président du CSA Claude Kieffer. « Il confirme que les enjeux de conservation du site ont primé sur les considérations autres », indique-t-il encore. « La décision appartient maintenant au préfet. Pour sa part le conservatoire des sites alsaciens est prêt à oeuvrer rapidement pour une protection durable et un entretien régulier du delta de la Sauer, dans le dialogue avec toutes les parties concernées ». Claude Kieffer ne souhaite pas entrer dans « la logique de conflit du maire de Seltz ». Et de regretter l'effet pervers de la procédure de désignation qui tend à mettre les différents acteurs du dossier en opposition alors qu'ils sont appelés au bout du compte à « travailler ensemble ». Le président du CSA prône le « duo » plutôt que le « duel ». « Nous continuerons à jouer la politique de la main tendue », résume-t-il.


J.-Marc Jankowski

© Archives des Dernières Nouvelles D'Alsace, 1999

  Samedi 13 Février 1999 Précédent  
   


 Ce n'est pas une surprise : le préfet de Région vient de désigner le conservatoire des sites alsacien (CSA) en tant que gestionnaire de la réserve naturelle de Munchhausen/Seltz.


 La lettre officielle du préfet a été envoyée au début de la semaine aux différents protagonistes du dossier. Le représentant de l'Etat a confirmé l'avis du comité consultatif de la réserve naturelle du delta de la Sauer émis en octobre dernier. La candidature du CSA, soutenue par les écologistes, a été préférée à celle des communes de Munchhausen et de Seltz.

 On se souvient de la colère des élus qui n'avaient pas supporté d'être mis sur la touche par ce comité consultatif dont ils remettaient d'ailleurs en cause la composition. Ils s'étaient montrés particulièrement virulents, redoutant d'être privés de leur souveraineté et de perdre la face devant leurs administrés. Ils avaient même menacé d'ester en justice si le choix du préfet se portait sur le CSA. Autre exemple : ils avaient envisagé de boycotter l'organisation des prochaines élections européennes. Aucune chance donc que les édiles acceptent la main tendue à l'époque par le président du CSA Claude Kieffer.

 Qu'en est-il aujourd'hui ? Vont-ils mettre leurs menaces à exécution ? C'est la carte de l'apaisement qui est en passe d'être jouée, semble-t-il. Le maire de Seltz Hugues Kraemer a accueilli la nouvelle assez sereinement. Il attend la réunion que le sous-préfet de Wissembourg organisera dans les jours qui viennent avec les acteurs du dossier, CSA, maires, député et direction régionale de l'environnement... « Je veux d'abord écouter le gestionnaire et les propositions de l'Etat et ensuite nous aviserons », a indiqué le premier magistrat.

 Le président du CSA Claude Kieffer est encore plus prudent. Hier, il n'avait toujours pas reçu la lettre du préfet désignant le conservatoire comme gestionnaire de la réserve. Il précise toutefois que ses propositions de dialogue avec les maires sont toujours d'actualité. Consensus en vue ?


J.-Marc Jankowski

© Archives des Dernières Nouvelles D'Alsace, 1999


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