Frankenthal
   

La réserve du Frankenthal-Missheimle est située au coeur du Parc naturel des Ballons des Vosges. Fréquentée par de nombreux touristes, une attention particulière doit être portée à la préservation de ses nombreuses richesses faunistiques et surtout floristiques. Ce souçi de préservation fait cependant naître chez certains habitants une impression d'abandon très éloignée des paysages travaillés et entretenus d'antan ...

Les archives disponibles :
- 29, 30, 31 Juillet 1997 : présentation (DNA),
- Vendredi 10 Octobre 1997 : un lecteur pour le débroussaillage (DNA).


  29, 30 et 31 Juillet 1997 Précédent | Suite  
   


 La jeune réserve naturelle du Frankenthal-Missheimle a besoin d'être protégée par des patrouilles, notamment en période d'affluence estivale. Une mission confiée à l'ONF et au Parc naturel régional des ballons des Vosges.


 Profitant d'une demi-journée ensoleillée, les randonneurs étaient nombreux, dimanche matin, au pied du cirque du Frankenthal. Un lieu magique surveillé, ce week-end, par deux amoureux de la nature : Alain Untereiner, un agent de l'Office national des forêts, et Yannick Despert, un technicien du Parc naturel régional des ballons des Vosges. Au cours de la haute saison d'été, 13 patrouilles sont organisées par l'ONF et le parc régional pour exercer une surveillance renforcée de la jeune réserve naturelle du Frankenthal-Missheimle.

 D'une surface totale de 746 hectares, cette réserve, qui s'étend du Hohneck au Tanet, a vu le jour en octobre 1995. « La réserve naturelle est un outil que ce donne l'Etat pour gérer quelques sites à haut intérêt patrimonial. Le parc naturel des ballons des Vosges a obtenu la gestion de la réserve. Le site est connu depuis deux siècles comme un des monuments floristiques. Ses cirques naturels sont riches en espèces rares, les plus riches de l'est de la France. Nous dénombrons jusqu'à 60 espèces aux 100 m². Le massif du Hohneck est remarquable par la présence d'espèces alpines, arctiques, reliques de la recolonisation de la végétation après le retrait des glaces voici 10 000 ans. De même, la faune présente un intérêt non négligeable » explique Alain Untereiner, un agent entré à l'Office national des forêts voici tout juste 20 ans.

 Ce dimanche matin, de trop nombreux randonneurs ont quitté les sentiers balisés de la réserve naturelle du Frankenthal. Le plus souvent par ignorance. Peu d'amateurs de randonnées ont conscience des dommages qu'ils peuvent causer à la nature en s'écartant des chemins.

 300 000 personnes foulent chaque année le sommet du Hohneck. L'affluence quotidienne peut s'élever jusqu'à 2 500 marcheurs. « Les pelouses sont fragiles, précieuses pour la science, pour le paysage. Elles peuvent être rapidement gagnées par l'érosion » prévient l'agent ONF de Soultzeren. Et Yannick Despert de préciser  : « il existe deux sentiers balisés au Hohneck, mais une multitudes de sentiers sauvages créés par les piétinements. Certains sont aussi larges que les sentiers officiels. Il est difficile de canaliser les promeneurs. A terme nous espérons pouvoir réhabiliter les zones endommagées en revégétalisant certains traces d'érosion. D'ici quelques années, nous aurons créé de nouvelles organisations de flux terrestres ».

En attendant, les centaines de milliers de randonneurs sont invités à respecter la réglementation. Voici quelques mois des panneaux d'information ont été posés à toutes les entrées de la réserve ou dans des lieux de grande affluence. Pour interdire mais aussi et surtout pour apprendre à regarder.



 La réserve naturelle du Frankenthal-Missheimle invite les randonneurs à découvrir des beautés florales insoupçonnées. Comment les observer tout en les protégeant ?


 « Si je les écoutais, je ferais quatre heures de botanique » lâche Alain Untereiner en quittant un couple de randonneurs au pied du cirque du Frankenthal. Un peu plus loin, un père de famille, accompagné de son épouse, de ses enfants et de quelques amis, souhaiterait voir les plantes carnivores. « Il en existe, mais vous avez peu de chances de les observer. Vous ne pouvez pas quitter les chemins balisés » rappelle l'agent de l'ONF. D'autres lieux sont spécialement aménagés pour la découverte de ces plantes.

 Mais tant d'autres fleurs offrent leur beauté dans la réserve du Frankenthal. Certaines orchidées poussent le long des chemins empruntés par des dizaine de milliers de randonneurs. En compagnie de Yannick Despert du Parc naturel régional des ballons des Vosges, l'agent de l'ONF s'étonne même de trouver des orchidées en boutons à quelques dizaines de centimètres d'un sentier très fréquenté. La majorité des randonneurs respectent la nature, mais Alain Untereiner ne se fait pas trop d'illusions. Lorsque ces orchidées auront fleuri, un promeneur sans scrupules pourrait bien être tenté de les cueillir.

 Lors de votre promenade, il vous sera plus facile de retrouver la pulsatille alpine, l'emblème des Vosges. Cette belle fleur blanche constelle les pelouses des plus hauts sommets. Les amateurs de jolies fleurs pourront également s'attarder sur l'aconit napel de couleur bleu, sur l'aconit tuloup. Une fleur de couleur jaune... aux racines très toxiques.

 « La position du massif vosgien a toujours empêché une couverture boisée continue » précise l'agent de l'ONF. La végétation forme un complexe végétal avec des éléments du glaciaire, de la chênaie, et de la hêtraie sapinière. Les forêts d'épicéas sur tourbe sont dignes d'intérêt. Les anciens lacs de l'époque glacière ont été progressivement comblés par la tourbe et colonisés par la forêt qui abrite de petites plantes d'une grande rareté. Les profondeurs de tourbe peuvent atteindre trois à quatre mètres. « Il faut 8 000 ans pour obtenir quatre mètres » calcule Yannick Despert avant d'expliquer que « ces hauteurs de tourbe permettent de faire une lecture de notre histoire ». La réserve naturelle regorge de merveilles insoupçonnées.



 La jeune réserve naturelle du Frankenthal-Missheimle est un site exceptionnel pour la protection de la flore, de la faune et de la nature dans son ensemble. Elle est en constante évolution.


 Confiée par le préfet au Parc naturel régional des ballons des Vosges, la gestion de la réserve naturelle du Frankenthal-Missheimle doit permettre de préserver et d'améliorer la qualité et la diversité de la réserve. Il en est ainsi pour la protection du peuplement floral (DNA du 30/07) et animal.

 Après sa disparition, le lynx a été réintroduit au cours des années 80. Ce félin a besoin de beaucoup d'espace. Il en est de même pour les chamois réintroduits en 1956. Leur population se limite à une soixantaine de têtes dans la réserve. Les oiseaux profitent également de ce vaste domaine de 746 hectares. « Il y a 20 ans, le faucon pèlerin était à la limite de la disparition. Protégé durant de longues années, il reprend actuellement de la plume de la bête » explique Alain Untereiner de l'ONF. Le grand corbeau récemment réapparu dans les Vosges niche également dans les parois rocheuses. Le cirque du Frankenthal abrite pour sa part l'accenteur alpin, un oiseau méditerranéen et montagnard. Yannick Despert, du parc naturel régional des ballons des Vosges tient également à souligner la présence de la chouette de tengmlam, « une petite chouette forestière vivant en montagne ou en zone nordique ».

Concertation

 La protection de la réserve, située sur les territoires des communes de Stosswihr, Munster, Soultzeren et Horod, ne peut se faire qu'avec le soutien de tous. Pour ce faire, le préfet bénéficie du concours d'un comité consultatif regroupant les élus locaux, les usagers, les propriétaires, les associations, des scientifiques, des administrations spécialisés. Tout n'a pas été sans mal. Les premiers rapports avec les quelques propriétaires privés, ils sont une quinzaine, ont été tendus. « Nous comprenons l'intérêt de gérer le site » explique aujourd'hui, ce fils de propriétaire, qui dénonçait auparavant sa mise à l'écart lors du lancement du projet. « La concertation s'est progressivement mise en place entre les propriétaires privés et les gestionnaires » précise Yannick Dessert.

 Les règles ne sont pas rigides. Elles sont adaptées en fonction des évolutions des milieux naturels ou des besoins humains. Des besoins qui peuvent représenter une menace pour le site. La forte fréquentation des randonneurs pose un réel problème. Mais ce problème n'est pas apparu avec la réserve naturelle. Depuis des années déjà, les touristes sont attirés par l'air pur de nos montagnes. La création de la réserve va permettre de gérer ces flux. De même, plus de la moitié des 550 hectares de forêt sont ou seront prochainement classés réserve intégrale. La réserve naturelle du Frankenthal-Missheimle fait peu à peu son chemin.


J.F.C.
© Archives des Dernières Nouvelles D'Alsace, 1999

 
Vendredi 10 Octobre 1997
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 Un lecteur de Stosswihr a lu avec attention et intérêt les articles parus dans les DNA, en juillet et septembre 1997, sur les opérations de débroussaillage dans la vallée de Saint-Amarin.


 Félicitant le maire d'Oderen, Pierre Egler, et les élus agriculteurs pour cette initiative, ce lecteur apprécie notamment « le ménage effectué dans les paysages ébouriffés et chevelus qui désespèrent touristes et autochtones ». Un exemple à suivre, selon ce résident de Stosswihr, qui souhaite un « débroussaillage » de la réserve naturelle du Frankenthal Missheimle. « Le seul souci de protéger quelques fleurs rares ne doit pas donner naissance à la fermeture de nos sentiers et de nos exploitations agricoles ». Et de déplorer  : « la désertion du marcaire du Frankenthal au Schiessroth », le manque de WC publics, de téléphone... Pour ce résident de Stosswihr, « le site est devenu désert, sans vie, une situation toujours souhaitée par Alsace Nature, une victoire verte au préjudice de l'homme et du bétail et de l'agriculture de montagne ».

 Ce lecteur soulève plusieurs questions évoquées notamment dans notre série d'articles, en juillet et août 1997, sur la réserve naturelle du Frankenthal. Rappelons seulement, que cette réserve présente un grand intérêt floral. Loin d'être un désert, ce site accueille de plus en plus d'amoureux de la nature. Les gardes de l'ONF et du parc naturel ont pour mission de gérer ce flux de randonneurs et non de leur interdire la réserve. Pour sa part, Jean-Marc Adnot président d'Alsace Nature, souligne que depuis la création de la réserve, les plantes rares reprennent le dessus notamment dans les couloirs d'avalanches.

 Par ailleurs, Jean-Marc Adnot rappelle que son association est favorable à une gestion agricole de la moyenne montagne, comme cela se pratique dans la vallée de Saint-Amarin. « Les terres agricoles peuvent apporter un intérêt écologique sur des zones ne présentant pas une grande diversité biologique ». Mais le maintien d'un élevage au Frankenthal ne présente pas d'intérêt économique, selon le représentant d'Alsace Nature avant de préciser que « l'éleveur du marcairie du Frankenthal a bénéficié d'aides de l'Etat pour s'installer dans la ferme du Schiessroth ».

 Enfin « le manque » de WC et de téléphone est encore plus criant dans les Alpes. Mais jusqu'où faut-il en installer, s'interroge Jean-Marc Adnot ?


© Archives des Dernières Nouvelles D'Alsace, 1999


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